"Quand je marche dans la vallée de l'ombre de la mort, Je ne crains aucun mal […]. Oui, le bonheur et la grâce m'accompagneront tous les jours de ma vie, et j'habiterai dans la maison de l'Éternel Jusqu'à la fin de mes jours". La Bible - Psaume 23
On se motive. Allez, c’est dimanche, la rentrée est passée, plus d’excuse pour ne pas aller au culte. "Bon… Ok, ok, d’accord." J’ouvre une paupière, puis l’autre. Une, deux, une deux, pump it up. "Mais où est-ce que je vais aller au culte ?" se dit l’étudiant de première année du fond de sa chambre de coloc ? Où est "la Maison du Seigneur" ? "Et comment la reconnaîtrai-je ?" Aux alléluias qui en sortent ? Aux endimanchés qui y entrent ? Au robusta-palmitos de l’accueil ? À sa façade ? À son clocher ? But where is mon Église ?
Comme sur tant d’autres sujets, la question du lieu d’implantation, de localisation de l’église, n’est pas perçue de la même façon d’une tendance protestante à l’autre.
D’un côté, il y a ceux qui plaident pour le concept "église au centre du village". Pour eux, l’église, le bâtiment doit se rappeler chaque jour aux regards des ouailles. Et de l’autre il y a la tendance "pour vivre heureux, montrons l’exemple" : vivons pauvres et cachés, façon arrière court ou zone commerciale. Comment montre-t-on l’exemple si l’on vit caché ? I ask you the question ?
Dans la première catégorie, on retrouve deux groupes d’églises que, sur le papier, tout semble opposer :
D’une part les dénominations à tendance multitudinistes, c’est-à-dire, ici, les églises qui considèrent que le périmètre de leur suzeraineté (quel vilain mot) est une zone géographique ou un type de population. Ce sont plutôt des églises dites "historiques" (luthériennes, réformées, anglicanes, etc.). Et, d’autre part, les megachurches qui considèrent que la population, dans un rayon de x kilomètres autour du bâtiment, est une zone de chalandise (quel vilain mot - oui, oui, il y a répétition, c’est exprès) constituée d’âmes à conquérir… Pardon, à convertir. Dans les deux cas, quelle que soit l’intention, il faut que l’église soit visible, inévitable, incontournable comme le denier du culte. Il faut qu’il soit impossible de l’ignorer.
Dans la deuxième catégorie, on trouve une myriade d’échoppes, d’ateliers ou de magasins de centre-ville reconvertis en "implantations durables", souvent évangéliques. Des églises, souvent modestes, qu’un coup de peinture a rafraîchies et qui sentent bon le poêle à mazout. Elles sont tellement modestes qu’on a beau être devant la porte, on ne se rend pas compte qu’on est devant une église ; tellement petites, que quand l’étudiant de première année y entre enfin (après avoir contourné, quel rebelle, l’inévitable église au centre du village), les bébés cessent de pleurer, toutes les oreilles l’entendent et tous les visages l’affichent.
Et puis, et puis… il y a bien sûr une troisième catégorie d’église, ni invisible, ni ostensible. Les églises au milieu. Au milieu de nulle part diront les narquois. À équidistance de tous répondrais-je. Il faut souvent une voiture pour y aller, c’est vrai, mais on y est bien. Le prédicateur, ni pasteur ni soumis, c’est toi, c’est moi, c’est nous. On chante, on y ouvre la Bible, certains ont appris le grec et l’Hébreux, le sens de chaque mot, d’autres connaissent tout par cœur. Il faut partir de chez soi pour y venir, mais on n’y est pas obligé. On y va parce qu’on veut, pas parce qu’on doit. Pas parce que mon père… ma grand-mère… depuis des générations, etc. Parfois, après le culte, pendant que les hommes font la cuisine, les femmes refont le monde.
C’est là, entre les tournesols et le blé, un peu au milieu de nulle part, que vous trouverez l’église de Gaubert. Dans ces terres, il y aurait des protestants depuis le XVIe siècle. Au milieu des champs, le vaillant clocher de l’église (ou du temple, dites comme vous voulez) n’a pas honte de qui il est, mais il ne fait non plus de l’œil à personne. Il résiste au temps, à la pluie et au vent, simplement. Comme la foi de ceux qui l’animent.
Un programme préparé par Christelle Diawara, réalisé par Jean-Bernard Ganne et produit par France.tv Studio pour France Télévisions
Christophe Zimmerlin, pour Présence Protestante